El-Jadida : de la Perle de l’Atlantique à l’oubli programmé ?

Ce qui a longtemps fait le charme singulier d’El-Jadida, ce qui lui a valu d’être couronnée du titre flatteur de Perle de l’Atlantique, repose essentiellement sur deux joyaux : sa plage et sa cité portugaise. Deux trésors patrimoniaux et naturels qui, à eux seuls, suffisaient à dessiner une identité forte, à imprimer un cachet unique à la ville. Le reste s’est greffé au fil du temps, comme des touches complémentaires d’une œuvre déjà splendide, conférant à cette cité une douceur de vivre rare au Maroc.
Mais plutôt que de capitaliser sur cette base solide, de la magnifier et de bâtir l’avenir dans sa continuité, certains ont choisi la facilité : détruire. Défaire ce qui a été fait. Effacer les repères. Exit les fameuses cabines de plage. Disparue, la passerelle qui faisait de l’hôtel Marhaba un établissement littéralement « les pieds dans l’eau ». Cet hôtel au style unique, inspiré des lignes du Titanic, semblait lui aussi vouloir rendre hommage au mythique paquebot englouti de l’Atlantique. L’aquarium à ciel ouvert, unique au Maroc ? Relégué aux souvenirs. Même les onze toilettes publiques qui existaient a El-Jadida à l’orée de l’indépendance en 1956,n’ont pas échappé à la destruction. Quant aux horloges publiques, plus aucune ne donne l’heure dans une ville qui semble elle-même avoir perdu la notion du temps.
Et l’on ne peut que se demander : à quoi ont donc servi certains élus ? À quoi bon occuper des postes de responsabilité si c’est pour laisser mourir à petit feu ce qu’un héritage, certes colonial, avait su préserver avec goût et vision ?
Lourdement frappée par l’hégémonie de lacorruption, livrée aux mains de médiocres dont le seul moteur est l’enrichissement personnel, El-Jadida étouffe. La Perle s’est ternie. Et derrière le vernis d’un développement de façade, c’est une agonie silencieuse qui se joue, face à une population désabusée, privée de mémoire, de repères et d’espoir.
Abdellah Hanbali

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