Il n’y a rien à faire , ni rien à voir dans cette ville. Une remarque que ne manque pas de faire d’emblée tout visiteur qui vient à El jadida pour la première fois .
Les jdidis de souche diraient plutôt qu’il n’y a plus rien à faire , ni plus rien à voir dans cette ville, où il était agréable de vivre dans un passé pas très lointain.
Un constat qui est loin d’être sévère. On a l’impression qu’ El jadida s’est transformée petit à petit en une espèce de ville conçue pour abriter l’ennui. Ou plutôt un village abandonné à son triste sort, semblant attendre, sans espoir, qu’ « on « vienne le soutenir dans son déclin permanent..mais , au fait, qui est » on » ? Les habitants ? …les élus locaux ?..On donne notre langue au chat pour le savoir.
Mais faudrait-il secouer sans cesse les uns et les autres pour les faire sortir de leur torpeur?
Elle est triste. Profondément triste. Et sale… affreusement sale…Et l’été n’y peut rien. Elle ne mérite peut-être même plus tout le soleil qui se déploie sur elle…, ni tous ces kilomètres de sable qui s’étendent à perte de vue. Le Deauville marocain a perdu tout son charme avec la condamnation des belles cabines de sa plage, qui faisaient son charme, remplacées par un mur de la honte qui a défiguré toute sa beauté. Même le printemps y est devenu terne. Les espaces verts et les beaux parcs ont perdu leur magnificence. Les fleurs, et les belles essences exotiques qui, hier faisaient leur fierté et leur orgueil, ont dépéri et survivent difficilement…
Ne parlons pas des ordures qui s’amassent ici et là et enlaidissent le gazon déjà dégarni par tant de piétinements et par manque d’entretien.
le béton a envahi tous les terrains des alentours, qui se paraient jadis de leurs plus beaux atours verdoyants dès la venue du printemps. La brume automnale et la pluie lui conviennent certainement mieux . Elles collent pleinement à son aspect renfrogné et à son ambiance morose…
A-t-elle perdu le sens de la fête ?
Une certaine forme d’amnésie nous fait penser que la fête a pris la clé des champs à cause de tous ces responsables irresponsables qui se sont succédé et sévi ( et non pas servi) à la tête de son conseil communal…
Non seulement ils n’ont rien fait de remarquable pour assurer le développement économique, social et culturel de la ville, mais ils ont pratiqué la politique de l’autruche en fermant les yeux sur plusieurs aberrations, en accordant des autorisations d’activités en contradiction avec les règles régissant sa bonne marche en laissant se dégrader son patrimoine historique et culturel dans l’indifférence la plus totale sans prendre les mesures qui s’imposent.
Condamner et laisser moisir est devenu leur mot d’ordre…
Tant de bâtiments historiques ont été détruits ou souffrent de déliquescence avancée par négligence et manque d’entretien … Parallèlement, on peut affirmer sans exagérer que la culture a été assassinée à El Jadida. Et une ville sans culture est une ville morte. On déplore vraiment le temps où étaient organisées , surtout en été, de nombreuses activités culturelles et sportives, telles que les parties de football et de volley sur le sable, de water-polo, des ateliers ludiques et pédagogiques pour les enfants , des concours de sculptures et de châteaux sur le sable, des pièces théâtrales sur la plage . ..les compétitions des voiliers …Et j’en passe et des meilleurs… Sans oublier les non moins célèbres Majorettes et les marches aux flambeaux, qui donnaient à la ville une ambiance festive…
Où sont nos cinémas ? Ils ont été hélas réduits en poussière et subi les coups des marteaux piqueurs, pour voir ériger à leur place des kissariat et des immeubles sans âme.. plus de films, plus de cinéclubs, plus de rêves, plus de loisirs. Plus de théâtre non plus. Le mythique Théâtre Afifi, appelé jadis salle des fêtes, dont les murs résonnaient des musiques des bals masqués, des soirées dansantes, et des échos des représentations culturelles variées, et qui sont hantés maintenant par les fantômes de toutes les célébrités artistiques qui y ont défilé, est en train d’agoniser à petit feu…
Feu « attisé » par les jets d’urines de tous les alcooliques de la ville qui viennent se soulager sur ses murs …
Que penser? que dire de cette descente aux enfers de cette malheureuse ville, aux multiples ressources et potentialités, mais qui tombe dans le chaos à cause d’élus incapables d’accompagner son développement et de préserver son identité, son patrimoine et son histoire et dont les regards ont été surtout focalisés sur les affaires juteuses et les passe-droits accordés aux amis et aux parents.?
Recouvrera-t-elle un jour ses lettres de noblesse, pour faire entrer un peu de joie dans les cœurs de tous ceux qui l’aiment et déplorent son état actuel ?
Des questions dont les réponses nous seraient peut être délivrées les jours à venir, (ou les années ? )…l’espoir fait vivre dit-on…
Khadija Benerhziel