Bien sûr, l’azur omniprésent et la chaleur implacable n’ont rien à voir avec les ciels tourmentés et les frimas de la côte normande. Mais tout de même. L’alignement des ex- cabines de bains, début de (XXe) siècle, l’architecture balnéaire si caractéristique de l’époque, la promenade aménagée sur le bord de mer, l’hippodrome lové dans les dunes… évoquent irrésistiblement la ville française de Deauville.
Du temps où il était gouverneur du protectorat, le général Lyautey s’était mis en tête de faire d’El-Jadida la copie conforme de la station balnéaire augerone.
Ainsi fut fait.
De ce petit âge d’or ne restent plus que ces quelques souvenirs qui ne sont pas toujours traités avec les égards dus à leur grand âge.
Nettoyée quotidiennement, autrefois, par une armée d’employés municipaux, la plage n’avait rien perdu de son attrait. Mais les temps ont changé et la plupart des édifices de la « Belle Epoque », quand ils existent encore, font piètre figure… et la carcasse de l’ex hôtel Marhaba balafre encore le front de mer.
Il y a longtemps que la référence Deauvillaise n’est plus de mise. Et les quelques timides tentatives pour redorer le blason de notre cité, ont toutes connues des échecs cuisants, par incompétence, mauvaise gestion, mauvais goût…ou tout simplement mauvaise foi et manque d’intégrité des personnes qui en avaient la responsabilité.
El-Jadida aurait mauvaise grâce de se plaindre…
D’ailleurs, les Jdidis, qui ont bien conscience d’avoir en main des cartes que bien d’autres villes moyennes du royaume peuvent lui envier, ne se plaignent pas.
Le secteur primaire ne se porte pas si mal. Le port de pêche, sur lequel flotte une odeur prégnante de sardines, ne connaît pas la crise qui affecte la plupart de ses semblables européens.
Et, avec ses productions laitières, maraîchères et de volailles, l’arrière-pays continue à justifier sa réputation de garde-manger de Casablanca.
Les milieux industriels ne semblent pas plus préoccupés par la crise mondiale, tenue pour conjoncturelle et peu susceptible d’entamer les atouts fondamentaux de la ville et d’une région qui constituent déjà le deuxième pôle économique du pays.
La proximité de Casablanca et de son aéroport international, l’ autoroute qui met la métropole à une heure de voiture, le doublement de la ligne de chemin de fer et, enfin, Jorf Lasfar, premier port minéralier du pays, sur lequel s’est agrégée une zone industrielle en perpétuelle expansion…
Courue Jadis, par la bonne société française et les élites locales, du temps du protectorat, elle n’est plus aujourd’hui une destination que pour les Marocains. Tenter aujourd’hui,de rencontrer un Gaulois sur la plage ou au centre ville, revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. les Européens restent, désespérément, absents. Ou, alors, ils ne font que passer.
Et même les casablancais et marrakchis qui avaient pour habitude de passer leurs vacances dans notre cité et profiter de son doux climat et sa magnifique plage, semblent nous bouder, pour d’autres destinations plus au nord.
« La cité portugaise est absolument superbe, mais on en fait le tour en une demi-journée, reconnaît un estivant européen. Et puis, ça manque cruellement de structures d’accueil. »
Classé au patrimoine mondial de l’Unesco, cet enchevêtrement de maisons ocres, cernées de hauts remparts, avait été créée de toutes pièces par les Portugais au XVIe siècle.
L’ensemble a un charme certain ; avec une mention spéciale pour la citerne, vulgaire réservoir d’eau, mais qui a l’élégance d’une salle capitulaire.
Se perdre dans cette micro-société, dont l’Église, la Mosquée et la Synagogue, réunis dans un rayon de 100 m, disent la diversité et le carrefour culturel que représente cette ville, sans nulle autre pareille , est un bonheur de chaque instant.
Bonheur qui ne sera, cependant, complet que lorsque l’ensemble aura bénéficié de la réhabilitation qu’il mérite.
Si nous évoquons ce sujet qui nous tient à cœur, c’est parce que cette cité est la capitale de l’AITA par excellence.
Elle possède des atouts qu’aucune autre région du royaume, voire d’Afrique du Nord , n’en rêve d’avoir un jour.
Par AITA, nous ne parlons pas de cette couleur musicale si chère à la majorité des doukkalis, mais d’Agriculture, d’Industrie, de Tourisme et d’Artisanat.
Tout ce qui nous manque aujourd’hui, c’est….que les hommes redeviennent des Hommes et faire d’El-Jadida un jardin, pour ne pas dire…un Paradis sur terre…ce qu’elle a été et ce qu’elle continue à être en dépit de toutes les « blessures » que lui ont assénées certains de ses fils biologiques ou adoptés.
Ramadan Karim
El Jadida Scoop




