Reine Beroria Cohen naquit à El Jadida le 18 novembre 1895 et mourut dans sa ville natale le 25 décembre 1927. Son père était Meir Cohen, riche personnalité d’El Jadida, propriétaire du grand immeuble construit en 1914 sur la place Hansali, ex place Brudo.
À l’âge de 18 ans, Reine put faire ses études dans un prestigieux pensionnat à Auteuil dans la région parisienne. Après son retour au pays, elle se maria à Jacob Bensimon, lui-même issu d’une famille connue à El Jadida. Ils eurent deux enfants : Sarah et Meir.
Reine décéda très jeune à l’âge de 32 ans, des suites d’un accouchement, mais elle laissa un manuscrit de ses souvenirs personnels qu’elle avait commencé à écrire en 1918 et qu’elle poursuivit jusqu’en 1924. D’une belle écriture, sur un papier à en-tête de « Hijos de Cohen à Mazagan», son manuscrit se compose de 56 pages. Nessim Bensimon, descendant de la famille Cohen, originaire d’El Jadida et vivant en France, a bien voulu en mettre une copie à notre disposition.
Le manuscrit en question fait partie d’un don de documents que j’ai remis aux Archives du Maroc à Rabat (convention signée le 22 juillet 2022), il raconte avec moult détails les relations familiales et sentimentales d’une jeune fille de la haute société juive jdidie au début du XX e siècle. Jacob Bensimon, qui sera son époux, y tient un rôle prépondérant.
Un chapitre révélateur tiré dudit manuscrit est publié dans mon ouvrage « El Jadida, destins croisés ». Il donne une idée des prémisses de la relation de Reine avec ce jeune homme qui sera son époux et du climat de jalousie et de déception que peut engendrer, entre filles et amies du même âge, une telle relation au sein d’une grande famille. Ce récit révèle, entre autres, que cette jeune fille, appartenant à une société marocaine encore cloîtrée, à l’époque, avait une capacité de réflexion et de jugement rare chez une personne de son âge. Elle jouait du piano et dansait la polka. Elle exprimait, par écrit, le fond de sa pensée en toute liberté et en toute pudeur aussi.
Ne peut-on voir dans ce récit des émois d’un jeune cœur, une variante mazaganaise des pièces d’Alfred de Musset « On ne badine pas avec l’amour » ?
Le manuscrit est consultable aux Archives du Maroc pour ceux qui le souhaitent.
Jmahrim()yahoo.fr
Chronique de Mustapha Jmahri : Les mémoires de la mazaganaise Reine Cohen aux Archives du Maroc
