Le jour où Baba devint héros national

« BABAAAA… Allaaaah ya BABA… » Ce cri rauque, haletant, presque désespéré, transperça les ondes hertziennes ce soir-là. À ce moment précis du match, le Maroc était toujours mené 1-0 par la Guinée. Les minutes filaient à vive allure, la fin semblait inéluctable, et puis soudain, feu Al Gharbi, légendaire voix des stades à la radio nationale, se mit à répéter inlassablement le nom de Baba.
Un nom martelé, scandé comme une incantation. On aurait dit que le commentateur, pris d’une émotion trop forte, vacillait au bord de l’évanouissement. Les Marocains, suspendus à leurs postes de radio, retenaient leur souffle. Les grésillements de la bande AM n’aidaient en rien : la voix de feu Al Gharbi devenait inaudible. L’angoisse montait.
Dans la confusion, un doute terrible nous saisit. Baba, ce défenseur connu pour ne jamais s’éloigner de sa surface, aurait-il commis l’irréparable ? « C’est foutu, je crois que Baba vient de marquer contre son camp », glissai-je à mon voisin.
Un silence lourd, presque irréel, s’installa. Puis, tel un miracle radiophonique, la voix de feu Al Gharbi revint, plus forte, plus vibrante : « Allah 3lik ya BABA… Allah 3lik ya BABA… BABAAAA ! »
Le miracle venait d’avoir lieu. Baba, l’homme de l’ombre, le roc défensif, venait de marquer le but de l’égalisation. Mieux encore, celui qui allait offrir au Maroc son titre de champion d’Afrique.
Tout au long de sa carrière, que ce soit au DHJ ou en équipe nationale, Baba a tout donné au football marocain. Ce but n’était pas une revanche, c’était une consécration. Et si son talent sur le terrain n’a jamais été contesté, ce sont aussi ses qualités humaines – sa gentillesse, sa modestie, son élégance – qui ont fait de lui un véritable gentleman du sport.

Abdellah Hanbali

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