Par: Driss Tahi
Les odeurs tellement exquises de Lahrira qui émanaient de toutes les maisons, emplissaient le quartier, et le faisaient baigner dans l’atmosphère spirituelle imposée par le mois de Ramadan , elles venaient malicieusement chatouiller nos narines , et accentuaient la lancinante faim qui taraudait nos petits estomacs d’enfants , nous faisant ainsi saliver jusqu’à faire craquer les plus faibles des gosses qui s’essayaient au jeûne ,à quelques dizaines de minutes du Ftour .
D’autres odeurs comme celle appétissante de la chebakia , ou celle chatoyante du batbout à la levure beldie , en cours de cuisson sur le Ferrah , au dessus d’un feu de charbon , mêlées aux notes monotones de tambour du fameux Bzioua annonçant le Shour , avec d’autres souvenirs collés pour toujours à ma mémoire, constituaient les rituels propres au ramadan de mon enfance.
Comment pouvait on concevoir Ramadan sans Lahrira, et chebakia , le Shour et son tambour ?
C’est vrai qu’à cet âge, on ne jeûnait pas encore pour ainsi dire ,de manière officielle , mais on le faisait un peu pour prouver qu’on était devenu presque adultes. Et surtout, afin d’avoir la possibilité de goûter au délicieux moment qu’offrait la rupture du jeûne, et pour avoir le droit de participer à l’ambiance familiale agréable autour d’un repas peu ordinaire, qui sans être un petit déjeuner, ne ressemblait en rien au repas de midi , ni à celui du dîner.
C’est le Ftour.
Le son du tambour de Bzioua à l’approche du Shour , nous parvenait comme un signal annonçant la fin d’une nuit ramadanesque . Mais aussi, la fin d’une escapade nocturne quotidienne, que tous les enfants du quartier se permettaient, avec ou sans le consentement des parents. Les parties de cartes, et les discussions sur les films par les uns, et les autres, perduraient jusqu’à nous attirer des ennuis.
On entendait les cris des mamans qui s’alternaient, et s’entremêlaient, provenant des fenêtres, et des portes des maisons, appelant leurs mioches : « Mustapha tu vas rentrer oui ou non? »
» Hassan, rentre, tu as vu l’heure? ton père va finir par aller te chercher, et ce sera ta fête « .
A mes amis d’enfance : Bouchaib Rahmoun, Azzedine Hnyen…