Je n’ai jamais vu autant de signes d’émotions se refléter dans un seul et même regard. On croirait être en contemplation face à une toile de grand maître d’où jaillissent des couleurs et des lueurs singulières et savamment dosées au point de vous fasciner longuement avant de vous lâcher, pour donner la chance aux suivants afin qu’ils s’abreuvent de cette même source d’enchantements.
Au fond des yeux de Baker Lemseffer, en ce jour de fête où il est à l’honneur dans sa ville natale El Jadida, on pouvait presque lire et à haute voix cette myriade de couleurs distinctives qui expriment la nostalgie, la joie, la reconnaissance, l’humilité, la fierté, la gratitude et surtout le bonheur, le grand bonheur d’être dans l’intimité des siens, au centre de la ville qui lui a offert sa première bouffée d’oxygène et au sein de ce sanctuaire de l’art qu’est le théâtre Afifi, où résonnent toujours en échos immortels les tirades de Baker l’adolescent, déjà aguerri pour le militantisme inconditionnel aux côtés de la famille des nationalistes de Mazagan.
Le moment est des plus solennels, l’Association Masque bleu théâtre et culture rend hommage aux personnes ayant contribué au développement de cet art à El Jadida dont justement Baker Lemseffer qui a été parmi les premier à fouler les planches du théâtre de la ville en 1946 lors de la présentation de la pièce “La suppression d’Al Amine”.
L’occasion aussi est notable puisqu’elle s’inscrit dans le cadre de la deuxième édition du Festival théâtral International la citerne d’El Jadida qui coïncide avec la Journée Mondiale du théâtre.
Comme de nature en pareilles circonstances, l’émotion dans toute sa grandeur est toujours à l’affût pour faire trembler les cœurs les plus accrochés et frémir les gosiers les plus fermes.
Et c’est sous les effets de cette forte charge émotionnelle que cette grande personnalité du nom de Baker Lemseffer, qui traîne dans son sillage toute une noble histoire au service de la Nation, s’est exprimé devant l’assistance pour remercier d’abord les initiateurs de cette manifestation.
Toutefois et toujours égal à lui même, ce stratège n’a pas manqué de jeter un regard plus loin et au delà des trois jours que dureront les activités du Festival. La suite de son petit mot ressemble beaucoup plus à des recommandations auxquelles il faudra s’atteler pour assurer l’épanouissement de cet art dramatique dont El Jadida représentait autrefois un véritable vivier.
Recommandations qu’on peut récapituler en trois idées comme suit:
- Création d’une académie des études de théâtre à El Jadida.
- Initiation d’un Festival de théâtre Africain.
- Formation d’une troupe de théâtre à la mémoire de Mohamed Saïd Afifi.
Chahid Ahmed