J’ai pris connaissance à travers une vidéo diffusée sur le site El Jadida-Express (en date du 6 juillet 2024) du parcours de la proviseure du lycée Chouaïb Doukkali à El Jadida, Madame Jamila Ezzine, qui vient de prendre sa retraite après une vie pleine de labeur et d’engagement.
J’avoue qu’au départ je n’avais pas l’intention de suivre la vidéo jusqu’à la fin, mais le récit de la proviseure m’a captivé, car elle parlait de ce qu’elle avait réalisé sur le terrain par la parole et l’image : l’embellissement de la cour de l’établissement et la sauvegarde des archives.
Elle-même, au départ professeure des Sciences de la Vie et de la Terre, elle voyait quand elle a été mutée à cet établissement une cour en terre et ciment vide de toute nature et de tout équipement récréatif. Ce paysage de désolation la choquait. Elle s’est mise alors au travail avec l’aide d’autres bénévoles pour métamorphoser cette cour qui a pris aujourd’hui une toute autre figure : la confection d’une petite fontaine avec l’eau, des plantes qui poussent toute l’année et qui rendent ce lieu de savoir beaucoup plus agréable. Chaque matin la proviseure fait sa ronde dans ce lieu pour s’enquérir de l’état des plantes.
L’autre réalisation, et non des moindres, est la sauvegarde des archives scolaires et leur organisation d’une façon impeccable. Ce travail fut réalisé, dit-elle, comme « projet pédagogique ». Il s’agit bien de sauvegarde car cette enseignante lors de son arrivée a d’abord cherché les archives et quand elle les a trouvées elles étaient pratiquement « jetées » dans un laboratoire près des toilettes où elles n’avaient rien à faire. Cette situation est d’ailleurs très courante dans plusieurs établissements et administrations où l’on a tendance à se débarrasser des archives « encombrantes » à leurs yeux.
J’ai suivi avec satisfaction le récit de Jamila Ezzine qui expliquait de l’intérieur de la salle d’archives, grande et aérée, comment elle avait fait pour classer, enregistrer et mettre en ordre les dossiers des élèves depuis la création du collège Chouaïb Doukkali dans un autre lieu avant de déménager dans le nouveau bâtiment.
Ses deux réalisations, dans le contexte local, peuvent être considérées comme deux grandes prouesses. Car au lieu que cette enseignante croise les bras, profite de son salaire mensuel et ne cherche pas midi à quatorze heures, comme font la plupart, elle a voulu donner un sens à sa vie professionnelle et à sa vie en général. Elle a donc réfléchi, mis ses idées en ordre, pris conseil ici et là et a ensuite entamé ce travail qui lui tenait à cœur, pendant des années jusqu’à avoir réussi. Sa ténacité, son engagement, sa patience lui ont donné raison, lui permettant de vaincre des difficultés diverses oh combien handicapantes.
Aujourd’hui Jamila Ezzine part à la retraite la conscience tranquille.
J’ai rencontré cette proviseure une seule fois, il y a quatre ans, dans son bureau pour lui remettre des exemplaires de mes ouvrages de la série « Les cahiers d’El Jadida ». Je me suis présenté en tant qu’ancien élève du collège Chouaïb Doukkali (pas encore lycée) de la toute première promotion. C’est-à-dire la promotion qui a occupé les lieux juste après la livraison du bâtiment flambant neuf dans les années 60. La célèbre promotion qui a déménagé les tables de l’ancien collège (aujourd’hui collège Lalla Meryem) vers le nouveau collège. Lors de ma visite, j’ai trouvé avec elle deux assistantes qui l’aidaient dans ce travail et elle m’a alors parlé de la mission qu’elle s’était assignée.
Mes ouvrages ont trouvé place dans un espace que la proviseure a consacré aux publications littéraires et scientifiques des anciens élèves de l’établissement.
Je n’étais pas au courant de la cérémonie organisée pour les adieux à Madame Jamila Ezzine. Je l’aurais remerciée pour ce qu’elle avait accompli, et c’est ce que je fais maintenant par le biais de cette chronique.
Mais le travail ne s’arrête pas là. Pour cet établissement, il faut que ceux qui ont pris la relève assurent la continuité. Il est souhaitable aussi, et ce n’est qu’un souhait, que Jamila Ezzine ; si possible bien qu’elle soit en retraite, assure la transmission de son expérience aux directeurs et proviseurs des établissements de la province d’El Jadida pour expliquer sa démarche et sa méthode afin de sauver les archives scolaires, qui sont en général mal entretenues.
Pour conclure sur une note tout à fait personnelle, mais partagée par beaucoup, je dirais que la femme marocaine fait toujours des merveilles.
Jmahrim()yahoo.fr
Photo : La proviseure Jamila Ezzine à gauche de la photo