Agonie d’une ville…
Une maladie chronique touchant des artères étroites, une surface de peau réduite à chagrin,…
Opération à cœur ouvert, tripes à l’air, la ville creusée, excavée, forée, pilonnée se laissait dépecer jusqu’au moment où son glorieux passé se révéla au grand jour: trésor archéologique! De nouveaux experts arrivèrent sur les lieux. On arrêta tout, laissant le ventre ouvert à tous les vents, dans l’attente d’une éventuelle décision des grands pontes, bien planqués derrière d’opaques cloisons.
Alors on avait tout accepté, tout regardé, sans broncher. La belle fut d’abord dépouillée de ses ombres et de ses secrets les plus intimes: on arracha les vénérables pins, les palmiers, on ravagea les squares à coups de tracto-pelles, on saccagea le moindre buisson, la moindre fleurette qui s’obstinait devant le carnage.
On défonça les côtes, on coupa la circulation, on greffa de nouveaux embranchements. On creusa. Partout à la fois. Puis on laissa, sans suturer, pour recommencer plus loin et encore plus loin.
La ville écorchée, déchirée, lacérée de toute part s’étiolait en lambeaux nécrosés, s’effondrait, exsangue et fourbue exposant, impuissante, impudique et bientôt vaincue, ses balafres suppurantes maculées aux regards qui se détournaient.
Kessfinii