Publié chez Gallimard, le premier roman de Meryem Alaoui « La vérité sort de la bouche du cheval » plonge le lecteur dans les tumultes des bas-fonds trépidants de la métropole casablancaise avec son lot de problèmes sociaux et de frustrations. Cependant les thématiques abordées : précarité sociale, prostitution, concubinage, alcool, ne sont pas nouvelles puisqu’elles étaient déjà et superbement évoquées dans les années 60 et 70 par le romancier connu Mohammed Zefzaf et par quelques autres romanciers et nouvellistes de sa génération tels Driss Khoury, Abdeljebbar Sehimi et Mohammed Choukri.
Pour le lecteur marocain, qui a vécu cette période, c’est donc presque du déjà lu. D’ailleurs, dans la seule rencontre organisée au Maroc pour la présentation du roman, l’assistance n’était pas nombreuse. L’auteure elle-même avoue : « la moitié de la salle était de ma famille, donc la scène était fatalement un peu biaisée, mais c’était bien ! ». À préciser toutefois que les rencontres culturelles de ce genre n’attirent plus au Maroc la même assistance que par le passé.
Ce roman raconte les péripéties de Jamiaâ, une femme de 34 ans aux mœurs légères vivant à Casablanca. Autour de Jamiaâ, qui vit seule avec sa fille, gravitent bien d’autres personnages de condition tout aussi modeste qu’elle : Chaiba, Halima, Chadlia dite « bouche de cheval » et d’autres. Tous ces personnages aiment boire et faire la fête selon leur moyen et tous affrontent les difficultés de la vie comme ils le peuvent. C’est ce que le regretté Mohammed Zefzaf dans un de ses romans désignait comme « Tentative de vie ».
Si les faits du roman se passent principalement à Casablanca, l’une des séquences se déroule à El Jadida (thème qui m’intéresse). De la page 29 à la page 37, les protagonistes, après avoir commandés des bières, partent en voiture à El Jadida où ils ont loué un appartement et y ont fait la fête. Rien de plus !
Dans un entretien avec un organe de presse, l’auteure fait remarquer que si cette histoire est le pur produit de son imagination, il n’en demeure pas moins que plusieurs faits et anecdotes sont bien ancrés dans la réalité marocaine. « Quand j’habitais à Casablanca, il y avait des prostituées qui travaillaient et vivaient à côté du marché de la rue d’Agadir… et comme j’étais fascinée par ces femmes, je m’arrêtais à chaque fois pour écouter leurs histoires. Il y avait aussi un gardien de voiture qu’on retrouve dans le livre et qui me racontait ce qui se passait », précise-t-elle.
Après une nomination au prestigieux Prix Goncourt 2018, Meryem Alaoui rejoint la liste de la première sélection des auteurs pour le Prix de Flore 2018. Depuis 2012, l’auteure vit aux États-Unis avec sa fille et son mari, le journaliste Ahmed Benchemsi.
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