Charles Fabre, ancien de Mazagan, est né à El Jadida le 7 avril 1915, de père britannique. Il était membre de l’Amicale des anciens de Mazagan en France et venait parfois en visite à El Jadida qu’il a quittée en 1957. Son dernier pèlerinage remonte à l’année 2008 où je l’ai rencontré chez son ami d’enfance, feu Jean-Louis Jacquety. Il y avait passé une semaine pour revoir sa ville natale et s’imprégner de son atmosphère perdu. Il devait décéder le 1er avril 2010, à l’âge de 95 ans, à Gonds, en Nouvelle-Aquitaine deux années après cette visite.
Charles Fabre fait partie d’une ancienne famille mazaganaise arrivée au Maroc depuis le 19ème siècle. Son grand-père Pedro Fabre, né à Gibraltar en 1839, est allé vivre à Tanger avec ses parents, puis s’est installé à Mogador et enfin à El Jadida vers 1860. C’est ce grand-père appelé Raïs Pedro par les Marocains qui pratiquait l’exportation de céréales, de sangsues et de boyaux à partir du port d’El Jadida. De plus, il assurait le ravitaillement en eau, légumes frais et viande des bateaux espagnols, anglais et français qui faisaient escale au port. Alors que son père Lorenzo Fabre alias Tajer Lorenzo est né à El Jadida en 1875.
Lorenzo Fabre possédait beaucoup de biens fonciers à El Jadida telles : la fabrique de limonade sur la rue Auguste Sellier (rue Zerktouni), un terrain au quartier del-Kelaa et une grande maison dite « Villa Aurélie ».
Le grand-père Pedro tenait aussi un magasin sur la route de Marrakech pour le compte de son compatriote, le négociant britannique Charles Balestrino. Dans ce fondouk, il achetait aux paysans des alentours de la ville du blé, de l’orge, du maïs, de l’avoine et du fenugrec quil mesurait, nettoyait de ses impuretés et mettait en sacs, sans compter les oeufs qu’il mettait en caisses toujours au nom de Balestrino et dirigeait sur le port où de grandes barcasses noires les transportaient vers les bateaux ancrés en rade assez loin des quais.
Je revois encore dans mes papiers la dernière lettre manuscrite de Charles Fabre qu’il m’avait envoyée de Royan dans le département de Charente-Maritime, en date du 22 février 2008. Il me disait : « Cher ami, j’ai lu avec émotion votre livre « Paroles de Mazaganais (2008) », car il me plonge dans une infinité de souvenirs de l’époque bénie de mon enfance et de ma jeunesse à Mazagan : des textes, des noms et des photos, tout me rappelle quelque chose. Je revois le passé et je pleure d’émotion ».
Dans son roman « L’immoralité » publié en 1902, André Gide ne disait-il pas : « Rien n’empêche le bonheur comme le souvenir du bonheur ».
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