Il a toujours été admiratif de la voir laver le linge à la main, pliée sur les seaux pleins de vêtements sales. La voir ensuite passer la serpillère, avant de se remettre à la cuisine, sortir de rien ou presque un déjeuner ou un dîner. Il était écrasé par la culpabilité de voir son corps s’user jour après jour. Il l’aidait quelquefois, dans quelques tâches dérisoires. Ça fait bien des années sans sorties, sans courses dignes de ce nom, sans petites attentions. Il s’en excusait parfois, il la remerciait souvent, espérant qu’elle se plaigne, pour lui demander pardon .Elle avait toujours un mot apaisant, une remarque rassurante d’une voix douce et soumise. Être aimée lui semblait déjà un privilège, elle pouvait tout supporter pour cela.
Lui n’était pas fier de n’être pas tout à fait un homme, sans travail et sans revenu. Il essayait, il avait des idées, nouait des contacts, proposait, mais rien n’aboutissait. Comme s’il était toujours en avance ou en retard, jamais quand il faut. On venait d’embaucher le mois d’avant, où on étudierait la proposition dans quelques mois, c’est la crise , c’est toujours la crise pour lui .
Il passait ses soirées, quand le monde menaçant de l’extérieur et que ses innombrables créanciers avaient fermés boutiques, à rêver de lendemains abondants. Il l’emmènerai dans les quartiers chics, lui payer la plus belle robe, assortie des plus belles chaussures. La livrer aux salons de beauté et la récupérer en princesse, être son serviteur, son chauffeur et son amant. Tout décider jusqu’au moindre de ses désirs, dans une soirée magique, pleine de lumières, de nectars et de rires déployés.
Elle venait presque tous les soirs, s’asseoir près de lui. Il lui prenait sa main, un peu moins douce pendant qu’elle pose sa tête sur son épaule.
Et comme chaque soir, il lui disait, que demain sera un nouveau jour.
Par :M’hammed Bencherki