Par: Mostapha Lekhiar
« Si l’on donnait un témoignage de regret à tout ce qui tombe, il faudrait trop pleurer. » Ecrit Chateaubriand en parlant des ruines antiques de Bordeaux.
Nous sommes redevables envers les générations futures, de notre patrimoine. Nous devons nous engager dans une action volontariste de préservation et d’enrichissement de ce capital que nous sommes censés léguer à nos enfants et petits enfants.
Or, ce à quoi on assiste actuellement, c’est à une destruction impitoyable de notre patrimoine hérité d’un passé pas très lointain.
Quartiers rayés de la carte, vidés de leurs habitants, avenues et rues défigurées par tant de constructions incongrues… Une dérive sournoise du concept même du patrimoine.
El Jadida agonise, se vide de ce qui lui est vital, sans personne pour stopper l’hémorragie ; sacrifiée sur l’autel du profit, mais aussi d’un manque de savoir faire et de goût.
La ville est en guenille : monuments délabrés, rues défoncées, poubelles débordantes, façades lépreuses du centre –ville… saccagée par une promotion immobilière, sans foi ni loi.
Pourtant, El Jadida, était naguère une merveille de l’architecture. Ce qui ajoutait une touche particulière à cette ville côtière où, jusqu’à un passé récent, il faisait encore bon vivre.
Mais par inconscience et/ou méconnaissance de la véritable valeur de ce véritable trésor, certains (souvent étrangers à la ville, mais nommés ou « élus » à sa tête) l’ont bradé pour deux fois rien.
Résultat, un patrimoine en ruine et des façades de plus d’un siècle, dotés d’une architecture et d’un design rares, sont en décrépitudes.
Une ville qui ressemble à un Bazar, où l’on « vend de tout », au dépend de l’esthétique, du beau et de l’âme véritable de cette cité.
Une ville encombrée où la fièvre immobilière a transformé tout espace en objet de convoitise
Le patrimoine de la ville, compte un grand nombre de sites historiques qui font partie de la mémoire de la ville, leur protection et leur sauvegarde est une urgence qui n’a pas cessé de s’affirmer au fil du temps.
C’est un patrimoine qu’on continue d’ignorer, puisqu’aucun inventaire systématique du bâti n’a été réalisé à ce jour, par les composantes culturelles de la ville. La classification des monuments historiques et des lieux de mémoires, s’est arrêtée depuis longtemps, et c’est ce qui explique la dégradation continue du patrimoine.
Ce que subit la cité portugaise, est la conséquence directe de l’irresponsabilité, du laisser-aller, des complicités, du goût du lucre et du mercantilisme exacerbé de certains élus.
Que peuvent se remémorer, aujourd’hui, les jdidis d’un certain âge, de leur ville d’enfance ?
Où sont passés, une majorité de repères et de lieux de mémoire d’El Jadida?
Aucun musée, aucun lieu d’évocation…et personne pour se dire qu’à travers la perte de notre patrimoine, c’est une partie de notre âme que nous perdons.