Il est loin le temps où on pouvait admirer les différents arbres ornementaux qui décoraient les artères et les rues d’El Jadida, plantés durant le protectorat et qui faisaient la fierté de la ville.
Malheureusement, nos ingénieux élus locaux ont été pris d’une passion inexplicable pour les palmiers qui ont remplacé peu à peu ces belles plantes, car ils haïssent la ville dont ils sont censés gérer les intérêts, haïssent ses citoyens, et haïssent tout ce qui est beau et esthétique. Ils semblent ignorer que la plantation des palmiers en milieu urbain n’a aucun bienfait ni sur le climat ni sur l’environnement, ni sur l’esthétique urbaine, et que l’endroit adéquat pour leur plantation est le désert. Ils n’ont aucune vision du beau, et du goût, et sont donc incapables de jouer sur leurs registres, ni d’aller voir ce qui se fait ailleurs, dans des pays comme le Canada, le Japon, les Pays-Bas . Où sans aller plus loin, en Espagne, et plus précisément à Séville, appelée à juste titre la ville aux mille et un orangers. En effet, on y recense pas moins de 40 000 spécimens d’orangers amers connus aussi sous le nom de bigaradiers peuplant ses rues, places et jardins.
Les espagnols ont ainsi planté depuis de nombreuses années des orangers dans les rues de Séville, qui produisent annuellement environ un million de kilos d’oranges, et le conseil municipal de Séville s’occupe de ces arbres et collecte la récolte dans la source pour en produire les meilleurs types de confitures. Entre janvier et mars, la campagne de récolte mobilise quarante-cinq ouvriers employés par la mairie et par l’entreprise qui transformera ces oranges en confiture, exportée spécifiquement vers l’Angleterre en raison de leur forte demande pour le produit. L’orange est devenue un fruit emblématique en Espagne (l’orange de Séville ou naranja) et reste très populaire. Ces arbres fournissent pour la ville de l’ombre en toutes saisons de l’année, et l’odeur des fleurs est très douce, surtout au printemps. Ces fleurs servent quant à elles pour la fabrication des meilleurs et plus chers parfums.
Par ailleurs, les oranges tombées sur le sol sont collectées puis transportées vers un complexe où de l’électricité est générée à partir de la matière organique. Le méthane capté lors de la fermentation des oranges permet de faire fonctionner un générateur. Nos gestionnaires locaux pourraient en prendre de la graine non? Car, sans souci esthétique, sans développement harmonieux, sans protection du patrimoine et de l’environnement, et par conséquent, sans culture au sens large du terme, une ville n’a pas de raison d’être…
KHADIJA BENERHZIEL
