Qu’il est révolu le temps où on osait comparer El Jadida à « Deauville » comme lui avait prédit le maréchal Lyautey. Avec son état actuel, ce nom ne lui sied plus.
En effet, la « dolce vita » d’antan ne se ressent même plus dans nos souvenirs, tellement les lieux qui permettaient de les raviver ont été éradiqués.
El Jadida avait une âme, et la saison estivale était attendue par les habitants avec une grande impatience. Les préparatifs à cette saison par la Commune commençaient juste après les vacances de printemps appelées auparavant « vacances de pâques ». Tout était préparé au moindre détail. Au centre-ville tout était propre et sentait presque la lavande, tellement les espaces étaient bien entretenus et les trottoirs et passages piétons repeints.
En été les rues étaient calmes pendant la journée car tout le monde se rendait à la plage, à Sidi Bouzid, ou au Môle (L’moune). Les plus lotis optaient pour la piscine de l’hôtel Marhaba qui offrait aux baigneurs la possibilité de « piquer une tête » à la plage, grâce à la passerelle (aujourd’hui démolie).
Quant aux soirées d’été, elles étaient bien animées et les estivants n’avaient que l’embarras du choix pour passer d’agréables soirées.
Le café Najmat Al Mohit offrait un panorama paradisiaque avec vue sur la mer et sur le Parc Mohammed V, pour les amateurs des chansons classiques.
L’animation ne manquait pas non plus sur la grande place du théâtre municipal où se sont produits de grands noms de la chanson marocaine.
Même à Sidi Bouzid, plusieurs spectacles étaient organisés, en plein air, au niveau du théâtre édifié par feu Mohamed Said Afifi.
Il est, malheureusement, bien révolu ce temps des beaux étés. Et il est déconcertant de constater cette dégradation que subit la ville d’année en année, sans qu’aucun signe d’une quelconque initiative de « sauvetage » en mesure de lui redonner vie, ne voie le jour.
Il faut souligner, avec regret, que partout où l’on passe à El-Jadida, on découvre les traces d’une histoire riche et variée, mais qui n’est pas valorisée par ces élus qui n’ont fait qu’accélérer sa dégradation.
Inutile de rappeler que seuls ces élus et les pouvoirs publics ont une grande responsabilité dans la réhabilitation de la ville. Mais ils sont, désespérément aux abonnés absents, attendant simplement une quelconque lueur d’un projet prometteur en mesure de renflouer leurs finances. Certes, les citoyens n’ont eu de cesse de multiplier les messages et les signaux d’alarme, mais sans aucun résultat probant.
Il est déconcertant le spectacle de cette ville devenue lugubre, défigurée, livrée à elle-même et où il suffit de regarder l´état des routes, des voiries, et des chantiers interminables en cours de réalisation… pour se rendre compte de l’indicible.
Il est grand temps et urgentissime de mettre en place une stratégie de restauration afin de sauver le patrimoine historique constitué par les monuments, les espaces verts datant de plus d’un siècle, le théâtre, et bien d’autres édifices qu’il devient impératif de réhabiliter, afin de redonner à cette belle cité son cachet et son éclat d’autan, et aussi le charme de ses belles soirées estivales.
Khadija Choukaili