Maria ZAKI, notre écrivaine et poétesse
jdidie qui a été découverte par le grand écrivain Feu Abdelkébir Khatibi, a
publié un recueil de poésie assez
particulier. C’est son 7ème recueil, intitulé: ET UN CIEL DANS UN PETALE DE
ROSE, poèmes entrecroisés avec ceux de Jacques Herman un poète belgo-suisse.
Les poèmes ont été mélangés sans signature et le lecteur peut procéder à l’identification
des auteurs en consultant le sommaire. Il s’agit d’une expérience littéraire
nouvelle susceptible d’intéresser les amateurs de poésie. Le livre a paru aux Editions L’Harmattan à Paris.
Maria ZAKI habite actuellement dans le Jura à l’Est de la France, à la frontière avec la Suisse. Sa poésie porte la
marque d’une grande finesse tout en versant dans la spiritualité et la
philosophie. Et son écriture, de manière plus générale, défend la cause
féminine et met en tension l’être humain en révolution avec les règles de la
société et les codes traditionnels.
A cette occasion, elle a accepté de
répondre à quelques questions que je lui ai posées.
Comment est née et s’est développée votre volonté d’écrire?
Depuis mon enfance, j’ai toujours connu des
états de grande sensibilité, des émotions intenses au contact de la nature et
des êtres. J’ai écrit mon premier texte à l’âge de 8 ans, lorsque je fus touchée
aux larmes par la situation familiale d’une camarade de classe, orpheline. Plus
tard, j’ai écrit une pièce théâtrale pour le collège Lalla Meriem où j’étudiais
adolescente, une pièce nommée «Le procès» où il s’agissait de juger une mère
qui empêchait sa fille de faire ses devoirs de classe pour se consacrer
exclusivement aux tâches ménagères. De temps en temps, je m’essayais à des
poèmes, mais cette période était surtout une période de lecture, de découverte
des grands poètes et des grands romanciers, le temps d’intérioriser les mots.
Certaines de ces lectures ont été de véritables coups de foudre pour moi. J’ai
très vite apprécié Baudelaire, Rimbaud, Blanchot, Kafka, Duras, Yourcenar…, et
aussi les auteurs arabes: Nagib Mahfouz, Gibran Khalil Gibran, et les plus
anciens comme Ibn Arabi et Jalal Eddine Rûmi et tant d’autres grands noms de la
littérature et de la philosophie, je ne peux pas les citer tous. Plus tard il y
a eu des personnes en plus des livres: mon mentor Abdelkébir Khatibi «paix et
miséricorde de Dieu sur son âme!» puis le poète et historien Abdelmajid
Benjelloun, ensuite Nicole Barrière mon éditrice qui est une grande poétesse et
sociologue française et dernièrement Jacques Herman, poète et artiste-peintre
belgo-suisse, mon co-auteur de ce dernier livre.
Quel est le rôle de la poésie?
C’est une question à laquelle il est difficile de répondre car chaque poète
peut avoir, et à juste titre, une opinion différente sur le sujet.
Personnellement, je pense que la poésie sert à nous aider à vivre. En créant
des passerelles entre le monde insipide dans lequel nous vivons et un univers
plus sain, plus beau. Lorsque tout va bien, que ce soit sur le plan personnel
ou sur le plan collectif, c’est elle qui nous permet de sublimer notre bonheur,
de rendre hommage à la vie et grâce à Dieu, et lorsqu’on est frappé d’un
malheur, le rôle de la poésie devient vital, car atténuer la confrontation du
psychisme avec la réalité n’est pas une mince affaire. On peut dire que le
langage poétique incarne une certaine hospitalité, un refuge qui permet de nous
abriter et d’accueillir l’autre. La poésie nous accompagne dans les différentes
étapes de la vie, calmes ou tumultueuses, en exprimant idées, opinions,
revendications ou simplement émotions et sentiments.
Ecrire de la poésie de nos jours peut paraître dépassé à l’aire de la
technologie et des nouveaux supports électroniques des arts et de la culture,
qu’en pensez-vous? L’image du poète composant des vers car il sent
l’inspiration monter en lui n’est-elle pas devenue un ancien mythe?
On peut être poète et songer à l’avenir, tenter de se renouveler, de se
remettre en question. Certes il y a des mythes qui sont attachés à la poésie
mais l’être humain ne cesse de détisser les anciens mythes pour les retisser
sous d’autres formes qu’il capte plus ou moins bien selon son époque, et ce
dans tous les domaines. Ce qui me semble primordial actuellement pour la
poésie, c’est de partager entre différents poètes une réflexion ouverte sur la
langue poétique, c’est pourquoi j’ai songé à écrire ce nouveau recueil en
collaboration avec un autre poète. Il faut avoir accès à cette ouverture
d’esprit, à ce dialogue entre pays et civilisations. Il faut pratiquer
l’Altérité pour atteindre l’Universalité. Chacun doit y travailler là où il se trouve
et sur sa propre spécificité qu’il enrichit et renforce. Ce travail doit être
considéré comme un travail de recherche à part entière. C’est cette recherche
qui permettra aux poètes de faire partie de leur temps et même de le dépasser.
En parlant de recherche, après avoir enseigné à la faculté des Sciences
d’El Jadida, vous exercez un métier de chercheur scientifique depuis que vous
habitez en France, comment arrivez-vous à concilier entre votre profession
et l’écriture?
Malgré ma formation scientifique, j’ai toujours eu un penchant vers la
littérature et la philosophie, c’est ma passion. Les livres sont devenus mes
amis depuis mon jeune âge puis avec le temps et quand je me suis mise à écrire
moi-même des livres, cette amitié est devenue indéfectible. L’écriture ne me
dérange pas dans l’exercice de ma profession, au contraire, elle me donne une
force interne et un sentiment plus fort de liberté créatrice. Bien sûr ceci
nécessite une certaine organisation pour partager le temps entre passion et
profession, mais ce sont les deux qui constituent mon équilibre, je ne voudrais
me passer ni de l’une, ni de l’autre.
Abdellah Hanbali