Extrait de « Nobilis Verecundus » roman en cours d’écriture par M’hammed Bencherki

La magnifique baie de Mazagao , premier nom donné à la ville, ne pouvait qu’inspirer les frères Francisco et Diogo De Arruda qui initièrent la construction de ce comptoir en 1514 , avec ce qui en fait son originalité exclusive , une citerne d’eau de pluie dans le cœur du bâtiment , qui lui permettait de tenir les sièges et subvenir aux besoins des colons.

La forteresse confortée par d’autres aménagements en milieu de siècle notamment la construction de l’église de l’assumpcion a pris l’allure d’une petite cité , qui entre deux batailles commerçait ou établissait des relations pacifiques avec les habitants de la région.

Le roi nommait des gouverneurs de ces places parmi les familles de la noblesse militaire ainsi que les roturiers les plus fortunés , qui armaient les caravelles pour de juteuses épopées maritimes. Pour cette nouvelle place , Emmanuel 1er avait chargé par décret le comte de Cumbria , apparenté à la dynastie régnante  et dont la  probité et la loyauté étaient connu de tous. Bien qu’il ne fût pas assidu à la cour, il jouissait tout de même du respect de ses pairs , et d’une certaine bienveillance de sa Majesté qui appréciait son retrait des intrigues et des compromissions usuelles du palais.

Retiré dans son château à Lagos  dans les terres d’Algavre  , nom tiré de «  Al Gharb » , l’Ouest en arabe , il avait fait prospérer la région qui fournissait au royaume le blé , le poisson en abondance de ses côtes , ainsi qu’un artisanat industrieux de matériaux de construction, hérité du savoir faire andalous. Le comte avait dans sa jeunesse participé à quelques expéditions maritimes , dont tout noble qui se respecte se devait faire le baptême de l’eau  et du commerce. Il avait fait montre de solides aptitudes dans le négoce et la direction d’équipage, assurant le succès financier des investissements de famille.

Sa dynastie jouissait également de la sympathie du petit peuple , par déférence au sang  royal mais surtout pour leur système de gouvernance , unique dans cette Europe de privilèges, qui faisait profiter la communauté de services de soins , d’éducation et d’entraide sociale, une façon de réinjecter en leur faveur les lourds impôts et taxes qui écrasaient dans la misère , les petites gens d’ailleurs.

Le comte était très visible. Il arpentait presque toujours les quais du port , où il aimait à s’enquérir de la bonne marche des déchargements, vérifier les stockages sous les auvents, converser avec le capitaine où même de pauvres dockers auxquels il remettait une pièce ou recueillait les doléances pour de prochaines faveurs dont on ne doutait pas. Il aimait particulièrement se rendre au port de pêche et les ateliers de salaison des sardines et maquereaux , en partance pour tout le pays.

Cette proximité avec ses concitoyens lui a valu de ceux-ci , le titre de « Noble  Modeste », qu’il a accueilli avec tant plaisir qu’il en fit la devise du blason de famille , donnant en latin «  NOBILIS VERECUNDUS » Cette trouvaille me laisse rêveur. Le monde est bien petit finalement , qu’il nous fasse rencontrer dans les lieux les plus inattendus et une attente de quelques siècles , un personnage de roman historique, de ceux qui n’ont existé que dans nos cours d’histoire à l’école , que nous mettions sur la scène de nos imaginations fécondes.

Je suis plein d’admiration , sans parti pris , pour les élans de conquête des nations où tous les génies se libèrent et assurent l’irrémédiable marche en avant de l’humanité. Il y a aussi , les terribles souffrances de ceux qui se sont arrêtés en route et qui se font écraser par le passage des plus forts. Aussi cruelle que soit l’histoire humaine elle n’est qu’un éternel recommencement dont les artisans se relaient et les outils se transforment.

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